En cas de refus de mariage, l’intervention du préfet est déterminante
L’intervention du préfet a finalement permis aux fiancés arcanguais de se marier. Pour la première fois depuis le vote de la loi du 17 mai 2013, un maire avait refusé de célébrer un mariage entre deux personnes du même sexe… et ses adjoints l’avaient suivi.
Politique, le geste a eu des conséquences juridiques notables. Pour les deux personnes concernées, ce refus constituait une violation de leurs droits. Pour le maire et ses adjoints, selon la qualification de ce refus, les risques pouvaient être administratif et/ou pénal.
Administratif, car comme l’a rappelé le ministre de l’Intérieur dans une circulaire du 13 juin 2013, l’article L. 2216-3 du Code général des collectivités territoriales dispose que « le maire et les adjoints, après avoir été entendus ou invités à fournir des explications écrites sur les faits qui leur sont reprochés, peuvent être suspendus par arrêté ministériel motivé pour une durée qui n'excède pas un mois. Ils ne peuvent être révoqués que par décret motivé pris en Conseil des ministres. […] La révocation emporte de plein droit l'inéligibilité aux fonctions de maire et à celles d'adjoint pendant une durée d'un an à compter du décret de révocation à moins qu'il ne soit procédé auparavant au renouvellement général des conseils municipaux ».
Pénal, car refuser d’exécuter une loi constitue une voie de fait, sanctionnée selon l’article L. 432-1 du Code pénal qui dispose que « le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique, agissant dans l'exercice de ses fonctions, de prendre des mesures destinées à faire échec à l'exécution de la loi est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. »
Si, en l’espèce, les fiancés ont saisi la juridiction pénale pour des faits de discrimination, leur mariage a pu être célébré après intervention du préfet. Le maire, en tant qu’officier d’état civil, agit comme agent de l’État et est ainsi soumis à l’autorité hiérarchique de son représentant dans le département. Le sous-préfet territorialement compétent a convoqué le maire et lui a demandé de célébrer ou de faire célébrer le mariage par un de ses adjoints. Telle fut d’ailleurs la solution choisie puisque le mariage fut célébré par l’adjoint au maire chargé de la Culture.
L’histoire ne dit pas, en revanche, quelle a été la solution choisie au pénal. En effet, une fois la plainte déposée, le procureur de la République, ou son substitut, choisit de mener une action publique, et donc de poursuivre l’auteur de l’infraction, ou d’abandonner les poursuites en les classant sans suite. Le fait que le mariage ait été célébré ne constitue qu’un élément de fait, qui entre en ligne de compte mais ne fait pas disparaître l’existence d’un fait matériel infractionnel. Si la plainte a été déposée pour le refus d’exécuter la loi, peut-être l’affaire sera-t-elle classée. Mais si elle a été lancée contre des pratiques discriminatoires, les magistrats du parquet considéreront plus facilement que la société a subi un tort que les juges doivent punir. Ces considérations de politique pénale sont par ailleurs à considérer sans préjudice de la faculté de requalification d’une infraction par le juge pénal.
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