Cinq questions à

Stéphane Brézillon, bureau de l’expertise territoriale et juridique de la ville de Paris, a accepté de nous répondre sur le projet de loi "Justice du 21e siècle".

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Si les mesures relatives au transfert de l’enregistrement du PACS par les greffiers des tribunaux d’instance vers les mairies sont adoptées par le Parlement, quel sera l’impact, selon vous, sur le travail des officiers de l’état civil et, plus généralement, sur l’organisation des services de l’état civil ? Cet impact dépendra du périmètre du transfert. Parle-t-on uniquement de l’enregistrement des nouveaux PACS ou les communes devront-elles également prendre en charge la gestion (modification et dissolution) des PACS antérieurs ? Dans quelles conditions se fera le transfert (des données informatiques et des dossiers papiers) des PACS des tribunaux d’instance vers les mairies ? Quelle commune sera en charge de ces PACS (pour l’heure, il est indiqué dans l’étude d’impact jointe au projet de loi que les PACS seraient adressés à l'officier de l'état civil de la commune du lieu du greffe du tribunal d'instance qui a procédé à l'enregistrement du pacte, et non aux 36 500 communes) ? L’impact dépendra également de la nature même de l’enregistrement transféré : sera-t-il identique à celui effectué actuellement par un greffier dans un tribunal d’instance ? Sera-t-il plus proche de la procédure d’enregistrement d’un mariage ? L’enregistrement d’un PACS pourra-t-il être délégué à un fonctionnaire du service d’état civil ? Autant de questions pour lesquelles nous n’avons pas encore de réponses, lesquelles impacteront nécessairement l’organisation du service et le travail des agents. On peut cependant d’ores et déjà prévoir des conséquences : d’abord en termes d’accueil des futurs pacsés, qui viendront s’ajouter au public actuel, parfois dans des locaux déjà exigus. Autres types de répercussions : l’adaptation de l’outil informatique et les capacités de stockage des anciens dossiers de PACS dans les mairies. Sans compter l’indispensable formation des agents. En quoi consistera cette formation et comment sera-t-elle organisée ? Il y aura obligatoirement une formation sur les aspects juridiques de l’enregistrement du PACS, sa modification, sa dissolution et sur les différences avec le mariage. En effet, le transfert des PACS vers les mairies entraînera sans doute des questions de la part des couples sur les conséquences de ces deux démarches. Les agents des mairies devront donc être en capacité de fournir une information de premier niveau. Il y aura aussi un besoin de formation sur les procédures d’enregistrement du PACS et en particulier sur l’utilisation des nouvelles fonctionnalités du logiciel d’état civil, qui auront dû être préalablement mises en place. Quant à la possibilité pour une commune de supprimer la double collection de registre de l’état civil, que pouvez-vous en dire ? Qui sera concerné ? La majorité des communes conservent, en plus du registre d’état civil sous format papier, les données sous format électronique. La première question à se poser est donc celle-ci : le stockage de ces données informatiques est-il sécurisé ? À partir du moment où une mairie pourra prouver l'intégrité, la confidentialité et la sécurité des données de l'état civil, selon les critères qui seront fixés par un futur décret concernant la sécurisation de la conservation desdites données, il y aura la possibilité pour elle de ne plus éditer un double des registres d’état civil et de ne plus envoyer des avis de mention. A contrario, une commune qui ne disposera pas de la capacité informatique de conserver ses données de façon sécurisée, ne pourra pas passer à l’étape de la suppression du double des registres. Qui décidera, en définitive, de cette possibilité ? Pour l’instant, ce qui est évoqué dans le projet de loi, c’est un décret qui énoncera les règles de conservation. Après, qui donnera l’accord ? Est-ce que ce sera du ressort du procureur de la République, qui est l’autorité de tutelle en matière d’état civil des mairies ? Sera-ce une instance du ministère de la Justice ? Pour l’instant, il n’y a pas d’information à ce sujet. En quoi la ville de Paris est-elle concernée par cette disposition ? La ville de Paris, qui conserve dans ses mairies d’arrondissement plus de 13 millions d’actes d’état civil, se doit de tout faire pour renforcer la sécurité de la conservation des données d’état civil et ainsi faciliter la réparation d’éventuelles dégradations. La sécurisation des bases informatiques de données d’état civil peut également permettre l’allégement de certaines procédures des officiers d’état civil comme la suppression du double des registres et de l’envoi des avis de mention. Enfin, l’informatisation progressive des données de l'état civil depuis plus de 20 ans et la reconnaissance de ces supports informatiques dans ce projet de loi ouvrent des perspectives intéressantes de modernisation de l'état civil, dans le prolongement des travaux réalisés dans le cadre du projet COMEDEC (communication électronique des données de l'état civil) pour la vérification des données d’état civil. Propos recueillis par Guy Malherbe