Cinq questions à Sylviane Faury
Sylviane Faury est responsable du service état civil/funéraire de la ville de Saint-Étienne (42).
Le projet de loi « Mariage pour tous » a été adopté définitivement. En connaissez-vous les principales conséquences sur le livret de famille ?
À ce jour, nous connaissons bien le contenu de la loi, telle qu’elle a été adoptée, mais pas encore les modalités de son application concernant l’état civil, en particulier le nouveau modèle de livret de famille. Nous attendons les arrêtés qui nous préciseront les instructions à ce sujet.
Lors d'une rencontre au sein de notre collectivité, l’éditeur Berger-Levrault nous a présenté un prototype d'un livret de famille commun à tous les « couples » élaboré en groupe de travail avec des juristes, responsables de services de l'état civil et la Chancellerie. Les mentions de liens entre les personnes seront supprimées et les agents d'état civil devront compléter les livrets en fonction de la situation juridique des personnes.
Nous ne pouvons donc pas anticiper ou même préparer les agents d’état civil au nouveau modèle, puisque nous découvrirons les livrets au moment de leur livraison par les éditeurs.
Pensez-vous que la Chancellerie aurait pu procéder différemment, en vous associant, par exemple, à la préparation du nouveau livret de famille ?
J’aurais effectivement préféré une telle solution, en tant que responsable d’un service état civil d’une grande ville, par exemple être associée au sein d’un groupe de travail, ce qui aurait permis d’aborder, en amont, les problèmes risquant d’être rencontrés par les agents mais le groupe de travail constitué avec des personnes référentes et compétentes tant au niveau communal qu'institutionnel a dû envisager toutes les problématiques.
La question à se poser est de savoir si le personnel sera suffisamment formé le jour de la mise en application de la loi et si nous disposerons du temps nécessaire pour être effectivement opérationnels. Le jour venu, il conviendra d’avoir toutes les réponses, toutes les explications indispensables pour répondre aux usagers. Lesquels auront parfois eu recours à Internet et obtenu des informations pas toujours fiables.
Ce que l’on sait aussi, c’est qu’il y aura un livret de famille unique, alors que la possibilité d’en avoir trois avait été un moment avancée. Est-ce que ce sera plus simple pour vous ou, au contraire, cela générera-t-il de nouvelles difficultés ?
En ce qui me concerne ainsi que les agents avec lesquels j'ai abordé ces points, cela me paraît plus simple et susceptible de faciliter notre travail. En outre, cela évitera tout effet discriminatoire et tend vers ce que veut la loi : supprimer les différences entre couples hétérosexuels et homosexuels. Cette harmonisation par le mariage doit pouvoir se faire également par les documents. Cela fait partie aussi des simplifications des démarches administratives.
On sait aussi qu’il y aura un champ de rédaction plus large laissé aux officiers d’état civil, qui devront s’adapter aux situations. Est-ce un cas de figure qui vous gêne ?
Encore une fois, les agents officiers d’état civil devront disposer de tous les éléments, informations et autres instructions pour pouvoir répondre à toutes les questions que se posent les parents ou futurs parents. Ils sont confrontés à des cas particuliers. Et le cas particulier n'est plus « marginal », il est récurrent... Il faudra, sans doute, à ce propos, organiser des ateliers de travail entre les agents et les responsables du service état civil pour décliner, en amont, tous les cas susceptibles de se présenter. Puis il s’agira, pour tous, d’être vigilants.
**En cas de doute, disposez-vous d’un moyen de recours ? Pouvez-vous par exemple faire appel au procureur de la République ?**
Il faut espérer, en effet, que nous aurons des instructions précises du procureur de la République de notre juridiction. Par ailleurs, nous communiquons beaucoup par l'intermédiaire du réseau des utilisateurs de notre logiciel de gestion de l’état civil. Pour répondre à nos interrogations ou fiabiliser nos réponses lors de cas particuliers, nous échangeons avec nos collègues d'autres villes de France via ce réseau.
Propos recueillis par Guy Malherbe