La reconnaissance en France d'un jugement tunisien ne peut pas s'opposer à un jugement français ayant l'autorité de la chose jugée
Le 12 juillet 2017, la Cour de cassation, appelée à se prononcer sur la reconnaissance d'un jugement de divorce international, a cassé un arrêt rendu par la cour d'appel de Metz. La juridiction avait accepté de reconnaître la validité de ce jugement, faisant fi d'une décision précédente qui se refusait à reconnaître la compétence du juge tunisien.
La question des jugements internationaux et notamment des mariages et des divorces revient avec régularité. Il s'agit alors de déterminer la nationalité de la juridiction compétente puis celle de la loi applicable, qui peuvent très bien être différentes. En l’espèce, le mari avait dans un premier temps intenté une procédure auprès d'une juridiction tunisienne le 14 décembre 2010 pendant que son épouse saisissait le juge français d’une requête en divorce le 11 avril 2011.
Le même litige étant porté devant deux juridictions différentes, c'est naturellement que le mari a soulevé une exception de litispendance rejetée par le juge français au motif que la juridiction tunisienne n'était pas compétente pour connaître le litige. L'ordonnance de non-conciliation donnait ainsi compétence au juge français pour trancher le litige.
Dans un tel cas de litispendance internationale, la loi française peut différer selon l'origine de la décision, l’exequatur (c’est-à-dire la reconnaissance du caractère exécutoire du jugement en France) des jugements européens étant soumis à des règles plus souples, tandis que certains pays, comme la Tunisie, bénéficient de conventions particulières établies avec la France. En l'espèce, c'est la Convention relative à l’entraide judiciaire en matière civile et commerciale et à la reconnaissance et à l’exécution des décisions judiciaires du 28 juin 1972 entre la France et la Tunisie qui a eu vocation à s'appliquer.
Saisie de la question de la litispendance, le juge français avait estimé que la juridiction compétente pour trancher le litige était le juge aux affaires familiales français puisqu’« aucun élément, alors que les époux avaient leur résidence en France, si ce n’est leur double nationalité et le lieu de leur mariage, ne permettait de rattacher le litige à la Tunisie et que la décision tunisienne n’était pas susceptible d’être reconnue en France ». L'ordonnance de non-conciliation en question n'ayant pas été contesté par l’époux, qui n'a pas relevé appel de la décision, elle acquérait ainsi l'autorité de la force jugée.
Pour autant en appel, la cour d'appel de Metz choisissait de donner force au jugement tunisien. C'est précisément ce que la Cour de cassation a jugé illégal, estimant que la Cour ne pouvait pas passer outre une décision passée en force de chose jugée.
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