La Cour de cassation se pliera-t-elle à l’avis de la CEDH concernant l’inscription à l’état civil des enfants nés par GPA à l’étranger ?
La Cour de cassation délibérera, le 3 juillet prochain, sur la question de l’inscription à l’état civil des enfants nés par le biais d’une gestation pour autrui (GPA) à l’étranger. Ce sera la première fois que celle-ci se prononce sur ce point depuis la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH). En effet, si l’interdiction de la gestation pour autrui (GPA) n’est pas remise en cause en tant que telle, la CEDH a, par deux arrêts du mois de juin 2014, condamné la France pour son refus d’établir la filiation de l’enfant avec ses parents d’intention car celui-ci porterait « une atteinte excessive à l’intérêt supérieur de l’enfant et à son droit à la protection de sa vie privée dont l’identité est l’un des éléments ».
La Cour de cassation est saisie de deux cas d’enfant nés de GPA en Russie de pères français. Dans ces deux affaires, la cour d’appel de Rennes avait rendu deux décisions différentes. Dans le premier cas, le 15 avril 2014, elle a refusé une telle inscription et dans le second, le 16 décembre 2014, elle l’a acceptée. Cette dernière position fait suite à la condamnation par la CEDH.
C’est maintenant au tour de la Cour de cassation de se prononcer sur le sujet. Si elle était totalement opposée à cette reconnaissance de filiation, en jugeant que cela « était l’aboutissement d’un processus frauduleux qui ne pouvait produire aucun effet », on peut s’attendre à un revirement de sa jurisprudence en raison de la position de la CEDH.
Ce vendredi 19 juin, l’examen du dossier a eu lieu et le procureur général, Jean-Claude Marin, a recommandé à la Cour d’autoriser l’inscription à l’état civil des enfants nés à l’étranger suite à une gestation pour autrui mais sous réserve de l’établissement d’un lien de filiation biologique par le biais d’un test de paternité. En effet, selon lui, « le droit au respect de la vie privée de l’enfant justifie que son état civil mentionne le lien de filiation biologique à l’égard de son père ». Il écarte cependant « la retranscription automatique de l’acte de naissance étranger sur l’acte civil français (qui) reviendrait à une reconnaissance automatique de la gestation pour autrui ». Cela viderait, en effet, de sa substance l’interdiction de la GPA en France.
Interrogée par BFMTV-RMC sur le sujet, la ministre de la Justice, Christiane Taubira, est favorable à cette inscription sur les registres d’état civil. Selon elle, « les enfants n’ont pas vocation à répondre de leur mode de conception, et […] ils ont le droit à être inscrits sur les registres de l’état civil ».
Sources :
- CEDH, 26 juin 2014, Mennesson c/ France, n° 65192/11
- CEDH, 26 juin 2014, Labassée c/ France, n° 65941/11
- Circulaire du 25 janvier 2013 relative à la délivrance des certificats de nationalité française
Lire également :
- « Transcription sur les registres français des actes de naissance d’enfants nés d’une GPA à l’étranger : le TGI de Nantes s’aligne sur la jurisprudence de la CEDH » – La Lettre Légibase État civil n° 56
- « La CEDH met le régime français d’interdiction de la GPA au pied du mur » – La Lettre Légibase État civil n° 53