Le tilde, motif de refus de l’enregistrement d’un prénom à l’état civil
Les parents d'un nouveau-né se sont vus notifier le 12 mai 2017 par la mairie de Quimper le refus d’enregistrer un prénom d’origine bretonne sur la déclaration de naissance de leur enfant. Un week-end plus tard, le 15 mai, la commune du Finistère revenait finalement sur sa décision, validant l’enregistrement du prénom. L’occasion de revenir sur les textes permettant de fonder sa décision face à un tel cas.
Il convient de rappeler que si le choix du prénom par les parents est par principe libre en France, il reste soumis à un contrôle. L'alinéa 4 de l'article 57 du Code civil dispose en effet que l'officier d’état civil peut, au moment de la déclaration de naissance, avertir le procureur de la République qu'il conteste le choix du prénom, ce dernier pouvant alors saisir le juge aux affaires familiales afin de demander la suppression du prénom sur les registres de l'état civil. Si de telles péripéties ne sont pas inédites, il s'agit en général de protéger l’intérêt de l'enfant contre un prénom qui pourrait lui causer du tort.
En l'espèce cependant, la problématique ne reposait pas sur le caractère handicapant du prénom mais sur l'utilisation d'un signe diacritique atypique, le « tilde ». Ce signe est utilisé dans de nombreux langages parmi lesquels le breton et se place traditionnellement au-dessus du « n » dans le prénom « Fañch », diminutif de « Frañsez », l'équivalent breton du prénom « François ». Le service de l'état civil de la ville de Quimper, se fondant sur la circulaire du 23 juillet 2014 relative à l’état civil, a rapidement notifié aux parents que l'utilisation d'un tel signe était prohibée pour établir l'acte de naissance.
La circulaire en question dispose en effet que ne peuvent être retenus pour établir un acte d'état civil français que les signes diacritiques ou ligature autorisés par la langue française et précise que « les voyelles et consonnes accompagnées d’un signe diacritique connues de la langue française sont : à- â - ä- é - è - ê - ë - ï - î - ô -ö - ù - û - ü- ÿ-ç ».
Le 15 mai dernier, après que le père se soit déclaré « triste et en colère » et que les voix des défenseurs de la langue régionale bretonne se soient fait entendre, la ville de Quimper, par la voie d'un communiqué, annonçait finalement répondre favorablement à la déclaration du prénom. Il est vrai que les langues régionales sont reconnues par l'article 75-1 de la Constitution comme appartenant au patrimoine français. Rappelant le principe de libre choix du prénom ainsi que la jurisprudence, protectrice de la vie privée, de la Cour européenne des droits de l’Homme, la ville estimait ainsi justifier sa volte-face par des « fondements juridiques heureusement plus pertinents et solides qu’une simple circulaire ».
Soutenant le choix des parents, la commune appelle désormais les « autorités administratives qui ont maintes fois démontré leur aptitude à se remettre en cause, à amender voire supprimer des textes qui n’ont plus lieu d’être ».
Sources :
- Const., art. 75-1
- C. civ., art. 57
- Circulaire NOR:JUSC1412888C du 23 juillet 2014 relative à l’état civil